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Latitudes nomades
18 avril 2012

La sagesse du nomade

« Raconter des histoires est la seule occupation concevable pour un être aussi inutile que moi », notait Bruce Chatwin (1940-1989) dans « La naissance d'un écrivain », l'ébauche d'autobiographie qu'il publia en 1983 dans le New York Times. Cette certitude, c'est d'un long voyage en Patagonie qu'il la rapporta. Parti vers l'Amérique australe durant les premiers mois de l'année 1975, depuis longtemps déjà le jeune Britannique rêvait de faire un livre sur « les nomades ici, là, passé et présent ». Un livre qui se pencherait « sur ce qui est, pour moi, la question des questions : la nature de l'instabilité humaine ». D'ouvrages, il y eut six en tout, parmi lesquels En Patagonie (1977), Les Jumeaux de Black Hill (1982), Le Chant des pistes (1987).

S'ajoute aujourd'hui La Sagesse du nomade, sa correspondance. Elizabeth Chatwin, la veuve de l'écrivain, et Nicholas Shakespeare, son biographe, ont œuvré ensemble, avec un soin et une précision rares, à retrouver, choisir, assembler, annoter si besoin cet ensemble de lettres qui embrassent quatre décennies de la vie de Chatwin et tracent de lui un admirable autoportrait en homme inquiet, fantasque, précaire, opaque, âpre souvent. Un errant, un pèlerin mû par une urgence tant physique que mentale, fuyant l'Angleterre - il se sent « si irréversiblement non anglais »... - et plus généralement l'Occident « décadent et corrompu », en quête d'un coup de foudre pour un paysage neuf, ou quelque individu que le hasard du voyage aura placé sur sa route. De la prose de Chatwin, l'intellectuel et poète allemand Hans Magnus Enzensberger écrit : « Sous le brillant du texte, il y a une présence qui nous hante, quelque chose de clairsemé, de solitaire et d'émouvant... » Dans ces lettres réunies, Chatwin nous parle de lui-même de cette même voix.

In Télérama. La sagesse du Nomade, Bruce Chatwin

sagesse

"Chatwin se décide à rédiger un ouvrage panégyrique sur le nomadisme, une sorte d'"Anatomie de l'errance" "qui dépasserait la théorie de Pascal sur l'homme, assis péniblement dans sa chambre." Sa thèse est la suivante: "En devenant humain, l'homme avait acquis, en même temps que la station debout et la marche à grandes enjambées, une "pulsion" ou instinct migrateur qui le pousse à marcher sur de longues distances d'une saison à l'autre. Cette "pulsion" est inséparable de son système nerveux et, lorsqu'elle est réprimée par les conditions de la sédentarité, elle trouve des échappatoires dans la violence, la cupidité, la recherche du statut social ou l'obsession de la nouveauté. Ceci expliquerait pourquoi les sociétés mobiles comme les tziganes sont égalitaires, affranchies des choses, résistantes au changement, et aussi pourquoi, afin de rétablir l'harmonie de l'état originel, tous les grands maîtres spirituels - Bouddha, Lao Tseu, Saint François - ont placé le pélerinage perpétuel au coeur de leur message et demandé à leurs disciples, littéralement, de suivre leur chemin."

Le livre une fois achevé est considéré trop confus par son auteur et impubliable.

(In: chroniques nomades)

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